"Prendre en compte le hasard, et intégrer l'imprévu" Lars Von Trier
- manonvandem
- 13 janv. 2017
- 5 min de lecture
Alice partie, je reste avec ma bande de garçons quelques jours avant d'accueillir une nouvelle invitée : Marina, une des allemandes rencontrée à la ferme. Nous prévoyons ainsi de rouler de Darwin à Alice Springs sur deux semaines, toujours à bord de ma merveilleuse voiture Charlie ; accompagnées de Ben et Math, qui voyagent eux, grâce à Eva. Même si mes biceps sont sur-développés et me permettraient de combattre une armée entière, voyager avec deux garçons, c'est toujours plus rassurant.
Jusqu'ici, tout va bien
Nous commençons le trip par une visite des rivières de Darwin, célèbres pour accueillir des crocodiles. En réalité, le terme adéquat serait plutôt "monstres des marées" ! En effet, nous avons pu faire l'heureuse connaissance de Brutus, reptile de 8 mètres de long et bien quelques 500 kilos. Et même si le vieux Brutus n'a plus toutes ses dents, on a vraiment, vraiment pas envie de se retrouver face à lui.

Nous visitons également Litchfield National Park et ses jolies cascades où le couple d'allemand rencontré plus au Sud nous rejoint le temps d'une journée. C'est ce genre de situations qui me font apprécier ce si grand voyage. Croiser et recroiser des personnes, se raconter ce que nous avons chacun vu depuis la dernière fois où l'on s'est quittés, partager, plaisanter, c'est juste génial !
Nous repartons ensuite tous les 4 vers Katherine, laissant derrière nous nos amis que nous espérons revoir un jour. Katherine, soit le dernier endroit "civilisé" que nous allons croiser jusqu'à Uluru, 1 100 kilomètres plus loin.
Quand tout à coup...
Évidement, nous ne pouvons pas rouler tous ces kilomètres d'une traite, nous prévoyons donc de nous arrêter aux endroits intéressants se trouvant sur la route, comme par exemple Bitter Springs, des sources d'eau chaude d'une clarté incroyable. Une baignade rapide et nous reprenons la route pour nous rapprocher du Red Center.
Enfin, ça c'est ce qui était prévu. Sauf que... Impossible de redémarrer Charlie, le moteur tousse mais rien ne se passe. Gentillesse extrême des Australiens oblige, une famille s'arrête en voyant notre capot ouvert. Le mari essaye de diagnostiquer rapidement mais nous dirige finalement vers le garage qui se trouve quelques dizaines de mètres plus loin. C'est le début du cauchemar. Le garagiste analyse la situation et suppose qu'il s'agisse d'une soupape mais il ne peut en être sûr car il lui faut démonter le moteur et il n'aura pas le temps avant la semaine suivante. Nous passons la nuit sur place et je décide de me faire rapatrier sur Katherine où le nombre de garages est plus important.
Marina reste bien évidemment avec moi, Ben et Math décident également de nous suivre, un geste adorable qui me touche encore aujourd'hui (merci les coupains).

Une très longue semaine
Me voilà donc bloquée dans un des campings de Katherine. Et je m'apprête à passer la semaine la plus HORRIBLE de mon voyage. Je passe mes journées au téléphone à essayer de décrocher un rendez-vous dans un garage pour que quelqu'un répare ma pauvre Charlie, mais PERSONNE ne souhaite s'y mêler. "La voiture est trop vieille", "ça va prendre trop de temps", "si c'est une soupape il faut changer le moteur", "les réparations coûteront autant que la voiture".... Bref, j'appelle tous les garages des environs mais personne, je dis bien personne ne souhaite m'aider. Une semaine longue, où je me sens seule et désemparée. Enfin, pas totalement seule puisque Marina, Ben et Math s'efforcent de me remonter le moral et de me changer les idées.
A cet instant, deux solutions s'offrent à moi : soit je perds de l'argent, soit je continue de perdre mon temps. Autrement dit, je dois choisir entre la peste et le choléra. Je me résous ainsi à abandonner l'idée de réparer Charlie, et je repasse mes journées au téléphone afin de trouver quelqu'un qui voudrait bien la racheter en l'état, et donc à prix cassé.
Il nous faut quitter Katherine au plus vite, nous ne supportons plus d'être ici. Tant bien que mal, j'arrive à trouver un acheteur et nous quittons la ville une semaine plus tard, tous les quatre à bord d'Eva, qui déborde littéralement.
Je laisse Charlie à Katherine, et un morceau de mon cœur avec. Alors certes, ce n'est "qu'une voiture", mais au final elle était bien plus que cela. Elle était parfaite pour parcourir le pays, c'était ma maison, mon moyen de transport. J'ai passé grâce à elle des moments inoubliables. Et par-dessus tout, je dois aussi renoncer à mon projet de visiter la Nouvelle-Zélande avec l'argent de la revente. Adieu Charlie (ici s'arrête la séquence émotion, promis).
Continuer sa route
J'essaie de relativiser malgré tout : je suis en bonne santé, je suis toujours bien entourée, ce n'est au final que de l'argent (mais beaucoup quand même). On continue, ce n'est pas grave, ça ira mieux demain. Et c'est vrai. Il nous reste à ce jour un peu moins d'une semaine pour faire la route jusqu'à Uluru. C'est assez serré mais ça va le faire. Nous roulons beaucoup, en plein milieu du désert, entourés pendant des heures et des heures de vide, de rien. Nous arrivons finalement à Alice Springs, mais nous devons rouler encore quelques heures pour atteindre Kings Canyon, un canyon incroyablement immense, toujours avec cette pierre rouge si particulière. Ce n'est pas pour rien que l'on appelle cette région le Red Center !


Et puis nous y voilà enfin, au pied du gros caillou, Uluru, aussi appelé Ayers Rock, le symbole même de l'Australie. Une formation rocheuse en grès haute de 348 mètres, située en plein milieu du pays, en plein milieu du désert Australien. Nous restons sur place assez longtemps pour assister au coucher du soleil puis au lever (ce dernier étant plus impressionnant que le coucher, à mon sens).

Le séjour de Marina touche à sa fin, nous la ramenons à Alice Springs où elle rejoint une de ses amies. Pour elles direction la Côte Est, pour les garçons et moi-même, nous redescendons vers Adélaïde en voiture.
Nous sommes le 4 Septembre, il me reste moins d'un mois avant de quitter l'Australie.
La fin d'une très belle aventure
Arrivée à Adélaïde sous une pluie torrentielle, je quitte à mon tour Ben et Math pour retourner à Swan Hill, la ferme où j'avais passé plus de deux mois avec mes chères et tendres ruminantes. En effet, je vous disais qu'il fallait effectuer ces fameux 88 jours dans un domaine agricole afin de pouvoir prétendre à l'extension du Permis Vacances-Travail. Or, il me manque encore quelques jours, et avec la perte de Charlie, quelques dollars également. Je retourne donc faire la traite des vaches pour deux semaines. Deux semaines suffisamment longues pour me rappeler ô combien ce boulot est pénible et fatiguant. D'autant plus que je ne suis pas dans la même ferme que les autres backpackers, puisqu'effectivement je me retrouve dans l'ancienne ferme dont la plateforme est beaucoup plus lente. Résultat, je travaille plus longtemps et seule, 7 jours sur 7. A cela se rajoute Alex, mon "coéquipier-superviseur", un australien sexagénaire au look d'un savant-fou (plus fou que savant), dont je ne comprends pas un mot. Au secours ! Les deux semaines se terminent à mon grand soulagement, il est temps pour moi de dire au revoir aux amis et de quitter Swan Hill, cette fois-ci pour de bon.
Je retrouve Math et nous redescendons tous les deux vers Melbourne pour y passer quelques jours. Nous sommes le 27 Septembre 2016, je quitte l'Australie 11 mois et 12 jours après y avoir posé pour la première fois les pieds.
A très vite, une dernière fois
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